Vendredi 13 NOVEMBRE 2009
De 18 heures à 20 heures
AMPHITHÉATRE FRANTZ FANON
Faculté de Droit et d’Économie de la Martinique
Campus Universitaire de Schœlcher
– Allocution d’ouverture :
Monsieur le Bâtonnier Raymond AUTEVILLE
Président de l’IDHM
– Introduction de la Conférence :
Monsieur Loïc DE GRAEVE
Directeur de l’IEJ.MARTINIQUE
Secrétaire Général Adjoint de l’IDHM
– Exposé :
« L’AUTONOMIE DANS LA CONSTITUTION FRANCAISE »
Monsieur Daniel JUSTIN
Professeur de Sciences Politique
Doyen de la Faculté de Droit
Et d’Économie de la Martinique
Université des Antilles et de la Guyane
Membre de l’IDHM
– Clôture :
Monsieur le Bâtonnier Raymond AUTEVILLE
Président de l’IDHM
La liberté politique se définit par l’ensemble des droits du citoyen, qui lui confère la possibilité de choisir le système d’organisation des pouvoirs publics. C’est donc l’un des droits fondamentaux dans une démocratie.
L’autonomie est un système d’organisation des pouvoirs publics, dans les relations avec les citoyens et avec le pouvoir central. Thème récurrent des débats et des politiques institutionnelles en France, la notion d’autonomie n’est pas facile à cerner. D’autant qu’elle donne lieu à des interprétations divergentes et nourrit souvent des polémiques, particulièrement (mais pas uniquement) dans les départements et collectivités d’outre-mer, soucieux de leur devenir au sein de la République française.
Et pourtant, cette notion ne peut être adéquatement appréhendée que si ses différentes acceptions sont précisées à la fois dans leur contexte historique, au regard de notions connexes, (fédéralisme, décentralisation, libre administration…) et de leur champ d’application ou de référence.
Après un examen attentif et critique de ses différents sens, non sans avoir procédé au préalable, à une mise en perspective historique et comparative, cette conférence propose d’évaluer la portée de la notion d’autonomie dans la Constitution de 1958.
Mesdames et Messieurs,
Monsieur le Doyen,
Monsieur le Directeur de l’I.E.J.,
Je me dois de commencer ce soir, par des remerciements à la Faculté de Droit, et à l’Institut d’Etudes Judiciaires (I.E.J.) Martinique, qui, à travers le partenariat avec l’Institut des Droits de l’Homme de la Martinique, se mettent à la disposition de la Martinique.
« Ne distingue pas Dieu du bonheur et place ton bonheur dans l’instant présent » (André GIDE).
C’est un président heureux, qui ouvre les travaux de l’Institut des Droits de l’Homme de la Martinique, pour la saison 2009 – 2010.
Je remercie chacun et chacune d’entre vous, de votre présence.
Je salue, les autorités qui nous font l’honneur, et pour certains, l’amitié, de partager avec nous ce moment de réflexion.
Je voudrais dire aux étudiants, combien leur présence ici est importante, car j’ai pu constater que certaines questions posées à leur examen de fin d’année, trouvaient leur réponse dans les conférences sur les Libertés et Droits Fondamentaux.
Notre Institut s’est enrichi de 6 nouveaux membres, que je veux saluer ce soir :
Notre doyenne, Madame Yvette VOUSTAD, infirmière à la retraite ;
Notre benjamine, Maître Marie-Line MARINE, avocat ;
Monsieur Henry PSYCHE, commerçant ;
Maître Max BELLEMARE, avocat ;
Maître Rufina FREITAS-ECOUE, avocat ;
Monsieur Maurice Antoine LAFORTUNE, avocat général honoraire à la Cour de Cassation.
Mesdames et Messieurs,
Pour la saison 2009 – 2010, l’Institut des Droits de l’Homme de la Martinique, en plus du cycle des Conférences sur les Libertés et Droits Fondamentaux, organisé avec le concours de l’Institut d’Etudes Judiciaires de la Martinique, a décidé également, de créer des commissions :
COMMISSION DES URGENCES MEDICALES EN MARTINIQUE
Cette commission dirigée par notre secrétaire générale, Maître Jacqueline RENIA, œuvrera pour le respect de la dignité humaine du malade, et le droit à l’accès aux soins aux services des urgences en Martinique.
COMMISSION PRISON
Dirigée par notre Trésorier Adjoint, Maître Marlène CUPIT, œuvrera pour le respect des Droits Fondamentaux de la personne détenue à la prison de Ducos.
COMMISSION PUBLICATIONS
Dirigée par notre Vice Présidente, Madame Claudine SALINIERE, cette commission est chargée de la confection des outils nécessaires pour la conservation des réflexions conduites par notre Institut :
Réalisation d’un CD ROM, contenant l’intégralité des actes des conférences sur les Libertés et Droits Fondamentaux, de la saison 2008 – 2009, grâce au partenariat avec l’Ecole de Gestion et de Commerce de la Martinique (E.G.C.) ;
Publication, en hommage à Madame le Bâtonnier Marie-Alice ANDRE-JACCOULET, des actes du colloque, portant sur la protection de la personne, de son domicile, et de ses biens.
COMMISSION ACCUEIL
Cette Commission créée l’année dernière, a été reconduite. Dirigée également par notre Vice-présidente, Madame Claudine SALINIERE, elle est chargée d’accueillir les participants à nos travaux, et de la communication de la documentation.
COMMISSION ICONOGRAPHIE
J’annonce ce soir, que je souhaite la création d’une Commission Iconographie.
La préparation de nos publications, a révélé notre indigence en photos, de nos activités.
Il faut remédier à cela. Je renouvelle l’appel que j’ai lancé ce matin, par message électronique.
Venons-en à l’objet de notre réunion de ce soir.
La liberté politique se définit comme l’ensemble des droits du citoyen, qui lui confère la possibilité de choisir le système d’organisation des pouvoirs publics.
L’autonomie est un système d’organisation des pouvoirs publics, dans les relations avec les citoyens, et avec le pouvoir central.
Notre Institut, qui a pour mission statutaire, de développer la formation théorique et pratique sur tous les sujets qui concernent les Droits de l’Homme, mais également, qui s’inscrivent dans notre réalité, se devait d’organiser la réflexion sur l’autonomie dans la constitution française.
Sujet difficile à traiter, mais ô combien important.
Je précise tout de suite, pour ne pas avoir à y revenir, que l’objet de notre réflexion, n’est pas le duel actuel entre les partisans et opposants des articles 73 et 74 de la Constitution.
Qu’on se le dise bien.
Le moment est venu pour moi, de remercier très chaleureusement Monsieur le Doyen Justin DANIEL, car, sans son engagement et le respect de la parole donnée, notre réflexion de ce soir n’aurait pas lieu.
Je cède la parole, immédiatement à notre Secrétaire Général Adjoint, Directeur de l’I.E.J., Monsieur Loïc de GRAËVE.
Raymond AUTEVILLE
Ancien Bâtonnier de l’Ordre,
Président de l’Institut des Droits l’Homme
De la Martinique.
L’autonomie dans la constitution française : Signification et portée d’une notion instable
Thème récurrent des débats et des politiques institutionnelles en France, la notion d’autonomie n’est pas facile à cerner. D’autant qu’elle semble se caractériser par son extrême instabilité au cours de l’histoire.
De surcroît, elle donne lieu à des interprétations divergentes et nourrit souvent des polémiques, particulièrement (mais pas uniquement) dans les départements et collectivités d’outre-mer (DOM-ROM), soucieux de leur devenir au sein de la République française.
Le Grand Robert nous propose la définition suivante : « Droit, fait de se gouverner par ses propres lois ». A la lecture d’une telle définition se pose inévitablement la question du lien entre autonomie et souveraineté :
– être autonome, est-ce la même chose qu’être indépendant ?
– et quelle est la nature de cette loi qui assure à la fois notre obéissance et notre liberté ?
Notion instable, l’autonomie est aussi source de multiples confusions du fait des usages sociaux et politiques dont elle est l’objet, sans que son contenu ne soit toujours clairement défini ou explicité. Il faut dire que ces usages restent indissociables de revendications politiques qui peuvent prendre des formes très diverses face à l’Etat unitaire, dont les réponses elles mêmes peuvent être évolutives et variables selon les modèles politico-institutionnels considérés.
D’où une impression de confusion dans l’utilisation de la notion. De ce point de vue, la période que nous vivons actuellement en est une illustration exemplaire. Il n’est que de lire les nombreux articles qui ont été publiés en France dans la presse après les différentes interventions du Président Nicolas Sarkozy annonçant la tenue d’une consultation en Martinique et en Guyane. Plusieurs constats s’imposent :
Si l’on remonte dans le temps, l’autonomie, dans sa dimension politique, a été l’objet d’un investissement très intense, parfois affectif, dans les DOM. On se souvient de l’affirmation progressive du mouvement autonomiste au cours des années 60 dans les trois départements français d’Amérique, couronnée par la demande d’un statut spécial aussi bien pour la Guadeloupe que pour la Guyane (Justin Catayé) ou encore la Martinique.
Ainsi, le projet de J. Catayé plaidait en faveur d’une région de Guyane administrée par un exécutif élu au suffrage universel et une assemblée régionale, et dotée d’une autonomie financière et monétaire.
De même, la Convention du Morne Rouge (16-18 août 1971) regroupant la CGTC, l’Union des Femmes de Guadeloupe, le PCG, le PCM, le PPM, la CGTM, l’Amicale des élus démocrates du sud de la Martinique ainsi que quelques organisations réunionnaises dont le Parti Communiste Réunionnais (PCR) a posé plusieurs principes :
– l’affirmation de l’existence d’entités nationales dans les DOM ;
– la revendication d’un statut d’autonomie avec exercice de pouvoirs très larges ;
– l’élection d’assemblées chargées d’élaborer le nouveau statut etc…
En 1978, Aimé Césaire a prononcé le célèbre « Discours des trois voies et des cinq libertés » : après une mise en accusation du régime départemental et l’affirmation du rejet de l’indépendance, il a décliné le concept d’autonomie en cinq libertés (douanière, commerciale, économique, culturelle et politique), ce qui n’est pas sans rappeler la revendication d’autonomie formulée par le leader du Parti Populaire Démocrate de Puerto Rico, Luis Munoz Marin dans les années 40 du siècle dernier.
Cette période a été marquée par des débats passionnés, l’autonomie étant souvent présentée comme l’antichambre de l’indépendance.
Au delà de ce bref rappel historique, une évidence s’impose : la notion d’autonomie ne peut être adéquatement appréhendée que si ses différentes acceptions sont à la fois replacées dans leur contexte historique et précisées au regard de notions connexes (fédéralisme, décentralisation, libre administration…) et de leur champ d’application ou de référence.
Partant de ce constat, ces quelques lignes sont structurées autour de trois axes principaux :
1) Une nécessaire clarification conceptuelle
2) la portée et les limites de l’autonomie dans la Constitution française
3) Au delà de la Constitution : comment appréhender l’autonomie dans le modèle juridique français et comment la rendre opérationnelle ? (Remarques conclusives)
Il serait vain de rechercher une définition précise de l’autonomie : il existe une grande disparité des situations en fonction des traditions juridico-politiques.
Le terme autonomie a un sens équivoque et son contenu reste imprécis, particulièrement dans le lexique juridique français : il est difficile de le distinguer de notions proches ou décrivant des situations différentes mais entretenant manifestement des liens de parenté.
Sans avoir la prétention d’être exhaustif, trois de ces notions méritent le détour – celles de décentralisation, de fédéralisme et de libre administration – avant de se pencher brièvement sur quelques exemples d’autonomie à l’étranger et sur la charte européenne de l’autonomie.
La décentralisation est un processus consistant pour l’Etat à transférer au profit des collectivités territoriales certaines compétences et les ressources correspondantes. Les collectivités territoriales bénéficient alors d’une certaine autonomie de décision et de leur propre budget (principe de libre administration) sous la surveillance d’un représentant de l’État (l’autorité de tutelle).
Cette autonomie se mesure :
– à la manière dont sont désignés les responsables des collectivités territoriales ;
– à l’étendue de leurs pouvoirs juridiques ;
– à l’importance des moyens matériels, et notamment financiers, dont ils disposent.
Toute la difficulté est dans l’appréciation de l’autonomie dont peuvent bénéficier les collectivités territoriales ; elle ne peut être qu’administrative – et non politique. Car cette autonomie reste toujours limitée :
Dans la constitution française, l’idée de décentralisation est indissociable de celle de libre administration.
La libre administration :
Le principe de « la libre administration des collectivités territoriales » est affirmé à l’article 34 de la Constitution de 1958. Plus précisément, selon cet article, il appartient au législateur de déterminer les principes fondamentaux « de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ». L’article 72 alinéa 3 de la Constitution explicite quelque peu ce principe : il prévoit que « Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités [c’est-à-dire les collectivités territoriales] s’administrent librement par des conseils élus ».
Ces dispositions constitutionnelles ont deux implications :
à La libre administration des collectivités territoriales est un principe constitutionnel.
à C’est le législateur (et non les autorités qui détiennent le pouvoir réglementaire) qui est compétent pour fixer les contours du principe de la libre administration des collectivités territoriales.
à La libre administration implique également que les collectivités territoriales doivent disposer d’une liberté de décision pour le recrutement et la gestion de leurs agents.
à De même, elles doivent bénéficier d’une autonomie en matière fiscale, autonomie qui est notamment prévue par l’article 72-2 de la Constitution.
à Les limites de la libre administration des collectivités Territoriales
Les limites de la libre administration tiennent d’abord au principe de l’indivisibilité de la République. Il en résulte que les collectivités territoriales n’ont qu’une autonomie administrative et non politique. Ainsi, elles n’ont pas, en principe, de pouvoir législatif. Elles ne peuvent pas choisir leur organisation, leurs compétences, leurs ressources ou leur régime électoral. Ces choix sont de la compétence du législateur.
En outre, conformément à l’article 72 al. 6 de la Constitution, les collectivités territoriales sont soumises à un contrôle administratif exercé par le représentant de l’Etat (c’est-à-dire le préfet). En un mot, elles n’ont pas « la compétence de la compétence ».
De plus, le principe de libre administration peut être limité par le respect dû aux autres droits et libertés constitutionnels. En particulier, l’application d’une loi relative à une liberté ou à un droit fondamental est de la seule responsabilité de l’Etat : elle ne peut être subordonnée à l’accord des collectivités territoriales. De même, la libre administration des collectivités territoriales doit être conciliée avec les exigences de l’intérêt national et avec le principe d’égalité.
Le fédéralisme
– le fédéralisme implique tout d’abord la superposition – plus ou moins claire, à l’instar du new fédéralisme américain – de plusieurs ordres juridiques sur le territoire d’un État ;
– il postule ensuite l’autonomie des autorités fédérées, qui disposent d’un pouvoir de décision exclusif, défini constitutionnellement, dans les matières de leur compétence ;
– il reconnaît enfin le principe de participation qui permet d’associer les collectivités fédérées à la politique fédérale, en qualité d’éléments d’un État commun.
Cela dit, l’étude des phénomènes politiques permet de relativiser la pertinence des représentations habituelles.
Alors que le fédéralisme est présenté comme allant beaucoup plus loin que la décentralisation dans un État unitaire, on retrouve dans les deux cas des collectivités dotées de compétences propres et d’organes de décision élus, disposant d’une autonomie plus ou moins forte.
De nombreuses Constitutions fédérales ont interdit la compétence d’auto-organisation, tandis que des processus audacieux de décentralisation, comme la dévolution du pouvoir du Royaume-Uni au pays de Galles et en Écosse, entreprise à partir de la fin des années 1970, et la régionalisation puis le «fédéralisme administratif», mené en Italie depuis le milieu des années 1990, n’aboutissent pas nécessairement à la forme fédérale.
à Le système autonomique résulte d’un changement constitutionnel à travers lequel la structure de l’Etat est profondément modifiée ;
à L’autonomie est une notion centrale, impliquant la possibilité pour les collectivités régionales d’exercer un pouvoir législatif propre dans le domaine de leur compétence ;
Il s’agit d’un système souple, différentiel mains instable qui peut aller au-delà du fédéralisme dans certain domaines, brouillant encore un peu plus les frontières traditionnelles.
Dans les faits, le fédéralisme semble même le plus souvent aboutir à unir et à centraliser, comme l’ont notamment montré les cas de l’Allemagne, des États-Unis et du Canada. À l’inverse, le cas de la Belgique montre que le passage de la décentralisation au fédéralisme peut être réalisé. Les frontières entre les formes de l’État sont donc également perméables.
Dans ces conditions, il est difficile de donner une définition générique de l’autonomie, seule la Charte européenne ayant fait une tentative en ce sens.
La Charte européenne de l’autonomie locale
La Charte européenne de l’autonomie locale s’y est essayée, avec plus ou moins de bonheur. Elle propose une définition résolument consensuelle dont la portée ne doit pas être surestimée. Elle procède à une clarification modeste mais nécessaire de la signification à donner à une notion pour le moins nébuleuse, comportant beaucoup de sens, mais peu de significations.
Toutefois, il s’agit d’un document d’une grande souplesse qui refuse toute proclamation péremptoire, l’autonomie apparaissant comme un but à atteindre, en dépit de la très grande diversité des situations rencontrées. La Charte précise les principes directeurs et les moyens techniques pour y parvenir.
Paradoxe de la constitution actuelle : elle introduit pour la première fois la notion d’autonomie en 2003, tout en limitant sa portée au regard de situations consacrées antérieurement par le législateur. En même temps, elle ne remet pas en cause ces situations, sans doute afin d’élargir le champ des possibles pour certaines collectivités situées outre-mer.
De ce point de vue, les statuts des Comores avant l’indépendance et du Territoire des Afars et des Issas sont intéressants à examiner. Ils comportent plusieurs dispositions allant dans le sens du renforcement de l’autonomie :
Plus récemment, le Constituant et le législateur ont consacré des formules d’autonomie relativement poussée pour la Nouvelle Calédonie et la Polynésie.
La Nouvelle Calédonie n’est pas une collectivité territoriale, mais une entité juridique singulière régie par le titre XIII de la Constitution présentant les caractéristiques suivantes :
à Elle est dotée d’une structure particulière qui n’est pas sans rappeler une forme de fédéralisme ;
à Trois « provinces » sont titulaires des compétences de principe, et sont les principales bénéficiaires de l’autonomie ;
à Une citoyenneté propre à cette entité constitutionnelle a été créée ; elle se traduit par la jouissance de certains privilèges ;
à L’assemblée est habilitée à adopter, dans des matières relevant normalement de la loi, des « lois du pays » soustraites au contrôle de légalité mais soumises à un contrôle de constitutionnalité particulier par le Conseil constitutionnel.
Quant à la Polynésie :
Pour apprécier le degré d’autonomie d’une collectivité territoriale, il faut donc aller au-delà de la notion telle qu’elle a été introduite de la Constitution en 2003.
III) Au delà de la Constitution :
Comment appréhender l’autonomie dans le modèle juridique français et comment la rendre opérationnelle ? Remarques conclusives
1) Comment l’appréhender ?
S’il est vrai que l’autonomie, telle que la notion apparaît dans la Constitution, semble se résumer à l’exercice d’un nombre restreint de compétences, il convient sans doute de s’interroger sur sa portée dans les faits et sur les degrés différenciés d’autonomie – dans le contexte institutionnel français – auxquels peuvent prétendre les collectivités territoriales, en particulier celles situées outre-mer.
Une telle démarche passe par la combinaison de trois éléments au moins : l’exercice des compétences, l’organisation administrative et le régime législatif, sans oublier la nature des relations tissées avec l’Etat au sein du cadre institutionnel ainsi défini (et qui peut être fondé sur un rapport de dépendance économique limitant l’autonomie politique).
à Art 73 : au delà de la clause générale de compétence conférée aux collectivités territoriales et qui pourrait être remise en cause sauf pour les communes, il faut se référer aux énumérations législatives des compétences transférées du double point de vue matériel et normatif ;
Compétences matérielles :
Il faut noter qu’en cas de création d’une collectivité unique, subsiste une incertitude sur la position du Conseil constitutionnel quant aux compétences supplémentaires qui pourraient être transférées ;
Compétences normatives
Elles peuvent être brièvement énoncées :
à Art. 73 al. 1 et 2 de la Constitution :
possibilité d’adapter les lois et règlements dans des domaines relevant de leurs compétences, au cas par cas, pour tenir compte des contraintes et caractéristiques particulières, à la demande expresse des collectivités concernées et à condition d’être habilitées pour une période ne pouvant excéder deux ans par les autorités compétentes, le Parlement ou le Gouvernement ;
à Art. 73 al. 3 et 5 : possibilité de dérogation normative s’analysant en une exception au principe de l’identité législative ; les modalités sont identiques que pour le pouvoir d’adaptation, même cette possibilité se justifie non plus par les « caractéristiques et les contraintes particulières », mais par les spécificités.
Ainsi ces collectivités régies par l’art. 73 disposent d’un pouvoir, certes encadré, mais que n’ont pas certaines COM (Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon) et dont est exclue, à sa demande, La Réunion.
à Art 74 : LES COMPETENCES
Compétences matérielles :
Plusieurs remarques s’imposent :
♦ Pour les autres collectivités, la règle consiste à réserver la compétence de principe à l’Etat et la compétence d’attribution aux COM ;
♦ Pour la Polynésie, c’est le principe inverse qui s’applique : on est proche de la formule en vigueur dans les Etats fédéraux.
Compétences normatives :
2) Comment rendre l’autonomie opérationnelle ? (remarques conclusives)
Au total, la réforme constitutionnelle du 28 mars 2003 a permis le transfert aux collectivités territoriales situées outre-mer des compétences matérielles et normatives étendues qui invitent à interroger la forme de l’Etat français. Cette évolution consacre-t-elle le franchissement de la frontière entre la traditionnelle autonomie administrative et l’autonomie politique ? Afin de répondre à cette question, il faudrait voir comment la pratique rend opérationnelles ces différentes formes d’autonomie.
La vraie question est de savoir au service de quoi peuvent être mises ces nouvelles formes d’autonomie. Au service d’une nouvelle forme de développement ? Avec quels instruments ? Faut-il par exemple demander l’exercice de la compétence fiscale, voire d’un pouvoir fiscal complet, afin de conduire plus efficacement le développement économique ? Quels seraient dans ce cas les avantages comparatifs, au regard des dispositifs actuels ?
Cela suffira-t-il à régler le problème de l’articulation entre politique économique (compétence de l’Etat) et développement économique (compétence locale) ?
Daniel JUSTIN
Professeur de Sciences Politique
Doyen de la Faculté de Droit
Et d’Économie de la Martinique
Université des Antilles et de la Guyane
Membre de l’IDHM
L’IDHM accueille
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Poste du conférencier
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